Trois mois après l’entretien avec la comédienne Laura Weissbecker à l’occasion de la sortie en DVD et Blu-Ray de Chinese Zodiac, Jackie Chan France récidive et vous propose un entretien exclusif avec le comédien (et un sérieux background de cascadeur) Alaa Safi, le rival de Jackie Chan dans Chinese Zodiac.
Alaa Safi est tout simplement présent dans les deux meilleurs morceaux de bravoure du film, soit deux combats ultra millimétrées: l’un dans un entrepôt autour d’un canapé et un autre dans les airs. C’est avec l’humilité des plus grands que l’interprète de Vulture a bien voulu répondre à nos questions.
L’ENTRETIEN:
Comment as-tu envisagé ta participation quand on sait que l’on va se battre contre la légende vivante Jackie Chan ?
J’ai beaucoup travaillé. Je me suis entraîné de manière intensive avec d’excellents chorégraphes français. J’ai étudié toutes les biographies de voleurs à gages que j’ai réussis à trouver (dans le film Vulture, mon personnage, est un des deux voleurs les plus experts au monde). Je voulais être au meilleur de moi-même quand je retrouverais Jackie sur le set. Il est l’idole de mon enfance! C’est un peu comme se préparer pour un rendez-vous galant avec Charlize Theron : tu passes une quantité de temps considérable devant ton miroir!
Comment as-tu fait pour être repéré ? Comment s’est déroulé ton casting ?
J’ai été repéré sur casting. Jackie Chan était présent, mais il ne me parlait pas, c’était le réalisateur Stanley Tong qui me posait les questions. Il me demandait si j’avais le vertige, si j’avais déjà sauté en parachute… et, oui: j’ai le vertige. A un certain moment, Jackie s’est levé, il s’est mis à côté de moi pour comparer nos tailles, puis après une forte poignée de main il m’a dit: “Well, see you soon.”
Comment as-tu appris ta participation à Chinese Zodiac ? Qu’est-ce que ça fait de savoir que Jackie Chan lui-même t’a choisi pour le rôle de Vulture ?
Il s’est passé un an depuis cette rencontre. Aucune nouvelle. J’ai envoyé un e-mail à la production pour les remercier de l’opportunité qu’ils m’avaient donnée et pour leur souhaiter bonne chance pour le film. Ils m’ont répondu en m’invitant à me rendre à la production le lendemain. Une fois sur place, avant d’entrer, plusieurs personnes m’ont arrêté en me demandant: “C’est toi Alaa Safi? Alors, t’es content?” Je ne comprenais rien. Je suis entré et ils m’ont annoncé que j’avais été choisi pour jouer le rôle principal du méchant, Vulture. J’ai repris le métro à Tolbiac, en sachant que j’allais bientôt affronter Jackie Chan!
Jackie est connu pour son exigence, en témoigne les nombreux making-of, a-t-il exigé une préparation particulière pour le film ?
Aucune. Il avait vu ma démo et il m’avait rencontré. C’est un maître dans son domaine, il pourrait diriger, former, transformer qui il voudrait. Evidemment, j’avais la plus grande confiance et je me suis laissé guider. Se préparer à un film avec Jackie Chan, c’est être prêt à lâcher prise et s’amuser, plus que tout.
Y-a-t-il eu un moment que tu as particulièrement apprécié sur le tournage ?
Tout le tournage de la chute libre finale! Quand j’étais gamin, je rêvais chaque nuit que je savais voler. Dans mes rêves, je n’avais pas le vertige et je m’envolais très haut sans avoir peur. J’ai appris les acrobaties et les tricks pour me rapprocher le plus possible de cet idéal, pour défier la gravité. Cette fois-ci en volant à dix mètres d’altitude, porté par la seule force d’un coussin d’air, mon rêve est devenu réalité!
Combien de jours de tournage a-t-il fallut pour mettre en boîte la scène de combat dans l’entrepôt et la chute finale dans les airs ?
Nous avons tourné à Pékin pendant 5 semaines dans l’entrepôt, dont 5 jours pour le combat sur le canapé. 5 mois plus tard, nous avons tourné la chute finale pendant 2 semaines en Lettonie.
Jackie Chan avait environ 58 ans sur le film. Tu lui en donnes combien après l’avoir affronté ?
25 ans d’âge physique, et 200 ans d’expérience !
Nous avons en France d’excellents cascadeurs et combattants malheureusement sous exploités dans le paysage cinématographique français. Comment envisages-tu ta carrière en France ?
Il y a quelques mois, j’ai dîné avec un ami cascadeur français qui vit à Hong-Kong depuis des années. Il me racontait, enthousiaste, comme il pouvait enfin exploiter pleinement ses capacités. On lui demande de se faire percuter par une voiture, de se battre sur le toit d’un train en marche, ou suspendu sous un hélicoptère, ou encore de traverser un yacht aux commandes d’une barque à moteur (les petites joies de la vie pour un cascadeur) alors qu’en France on l’appelait pour tomber à vélo. Personnellement, je n’ai jamais eu cette passion pour le risque. C’est pour cela que j’ai arrêté la cascade il y a des années et que je me suis lancé comme comédien. Dans le cinéma les barrières nationales sont très relatives. Quand j’ai compris que la force de cette forme d’art était l’universalité j’ai commencé à étudier les langues. Aujourd’hui je parle le français, l’anglais, l’italien, l’arabe, l’espagnol et un peu le thaïlandais. Cela me permet de travailler en France comme ailleurs.
Peux-tu nous parler de ton programme d’entrainement ? T’es-tu entraîné avec Jackie ?
Mon entrainement varie beaucoup selon les exigences du film pour lequel je me prépare. Pour CZ12 je me suis concentré sur les arts martiaux en reprenant une routine que j’ai suivie pendant plus de quinze ans de pratique du Taekwondo, pour l’agilité et le renforcement musculaire. J’ai beaucoup travaillé le combat scénique. Je ne me suis jamais entrainé avec JC et je ne l’ai jamais vu s’entrainer. C’est ce qui était surprenant: à “action!” il était prêt, sans échauffement ni assouplissement. Il était le plus rapide, agile et précis de nous tous.
Qu’est-ce qui t’a donné envie de faire ce métier d’acteur ?
J’étais un garçon très complexé et introverti. Le cinéma était une échappatoire pour moi, le lieu magique où je pouvais me projeter dans la vie de quelqu’un d’autre et en partager les aventures. En grandissant, j’ai cherché à retrouver cette sensation de liberté. Ma pratique des arts martiaux m’a servi de carte d’accès pour approcher la « machine à rêves ». Je voulais être acteur pour être à la source, là où l’illusion naît.
L’image que tu as de Jackie a-t-elle changé maintenant que tu l’as côtoyé de près ?
Bien sûr, le fréquenter et travailler avec lui pendant plusieurs semaines m’a permis de l’apprécier d’avantage. Une des qualités que j’admire le plus chez lui est sa loyauté: son sincère attachement à l’équipe qui travaille avec lui depuis très longtemps. C’est une vraie famille. Aussi, l’étranger, comme moi, qui arrive est accueilli comme s’il en faisait part. Tous, du chauffeur au chef opérateur, l’appellent « Daïgo », qui signifie grand frère.
Quels conseils donnerais-tu pour celles et ceux qui désirent être acteur ou cascadeur au cinéma et pourquoi pas, atterrir dans un film avec Jackie Chan ?
Etudier avec passion et sans relâche. Travailler sur soi avec rigueur et discipline. Apprendre de tous avec curiosité et humilité. Rester fidèle à soi-même, toujours, et le reste suivra!
As-tu une anecdote à propos de Jackie ?
Jackie est un self-made man. Un homme d’action, dans tous les sens du terme. Depuis son enfance, il s’est battu pour réaliser ses rêves, et aujourd’hui c’est encore de lui-même qu’il en exige le plus. Un jour, sur le plateau, il a éternué. Je lui ai dit: « God bless you », il m’a répondu en souriant mais convaincu: « I bless myself! »
Un dernier mot aux lecteurs de Jackie Chan France ?
Je vous souhaite de tout cœur de vivre vos propres rêves!
Un grand merci à Alaa Safi pour nous avoir accordé avec amabilité cet entretien exclusif.
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Propos recueillis par Anthony Pho avec la participation de Jérémy Diaferia et Thierry Lorenzi
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